Message de Carême

Tableau de Bruegel (XVIe S.) : La parabole des aveugles
Carême 2018
Faire mémoire, pour venir à la lumière !
Chers frères et sœurs,
C’est à partir des lectures, prévues par la liturgie pour le mardi de la 6ème Semaine du Temps Ordinaire (années paires), veille du Mercredi des Cendres, que j’ai rédigé ces quelques lignes (Jac 1, 12-18 et Mc 8, 14-21).
Sur le lac, les Apôtres sont inquiets, ils ont oublié de prendre du pain et ils vont avoir faim… ils en discutent entre eux. Jésus les renvoie à leur mémoire, au souvenir de la multiplication des pains où, avec cinq pains il a pu nourrir largement cinq mille hommes ; puis, avec sept pains, quatre mille hommes. L’angoisse d’avoir faim alors que Jésus est là, présent, avec eux, n’a donc pas lieu d’être.
Chacun de nous connaît le poids de l’angoisse dans sa vie ; elle a, pour chacun, un visage bien concret, bien réel. Nous savons, par expérience, combien, par le passé, le Christ nous en a sauvé, à défaut de nous en avoir délivré. Traverser l’épreuve, traverser le lac lorsque se lève une tempête, a été possible, avec Lui, en vivant en Sa présence.
Ne pas oublier, faire mémoire des merveilles que le Christ a accomplies dans nos vies, voilà qui Lui permet de renouveler sans cesse ses merveilles en nous.
C’est le Mystère de l’Eucharistie, où, chaque dimanche, chaque jour, nous « faisons mémoire » de sa mort et de sa résurrection, de son Mystère pascal, de son Acte d’amour éternel qui ne passera jamais. En refaisant les gestes que Lui-même lors de la Sainte Cène a établis pour nous : la veille de sa mort, Il prit le pain et le vin, Il rendit grâce, Il rompit le pain et fit circuler le pain rompu et la coupe de vin, nous découvrons sa présence en nous, celle de l’actualité de son Amour éternel !
Désormais, nous comprenons que toute notre vie se doit d’être un mémorial constant de son amour pour nous ; nous ne pouvons pas tenir dans les épreuves si nous oublions son Amour ; Lui, ne peut pas nous rejoindre et se rendre présent à nous dans nos souffrances, si nous oublions ce qu’il a fait pour nous, par le passé. La liturgie nous enseigne, comme d’ailleurs toute la Bible, que lorsque nous faisons mémoire de son amour, il réalise pour nous, aujourd’hui, ce qu’il a fait pour nous par le passé. C’est ainsi que lorsque le peuple d’Israël se retrouve en exil, au bord des fleuves de Babylone (entre 587 et 538 avant Jésus-Christ), il se souvient de ce que Dieu a fait pour lui (en 1250 avant Jésus-Christ) lorsqu’il était esclave en Egypte et qu’Il l’a libéré du joug du pharaon, et il trouve l’espérance et la force pour traverser l’épreuve.
Dans sa Lettre, saint Jacques nous met en garde contre le risque que, dans l’épreuve, nous n’en venions à dire « ma tentation vient de Dieu ». De fait, oublier les merveilles de Dieu, c’est se retrouver désarmé face à l’épreuve, et amené à penser que Dieu nous a abandonnés, alors que, se souvenir de son Amour, c’est découvrir sa présence aimante dans l’aujourd’hui de nos vies. Et saint Jacques ajoute : « Il a voulu nous donner la vie par sa parole de vérité ». Le contact quotidien avec la Parole de Dieu, écoutée avec le cœur, méditée avec le cœur dans la foi en Sa présence, nous met en présence de son Amour, nous ouvre à la prière (action de grâces ou supplication, ou cri de détresse…) pour nous illuminer de l’intérieur par Sa présence aimante.
Voilà ce que le Carême peut faire en nous ! Il nous est seulement demandé de répondre à cette invitation à goûter la présence de Jésus-Christ qui nous redit son amour pour traverser les épreuves de nos vies, en prenant le temps d’ouvrir l’Evangile, pour écouter ce qu’il a à nous dire.
Peut-être que ce qu’il nous dira ressemblera alors à ce qu’en a écrit Paul Evdokimov, un grand théologien orthodoxe :
« Sauf de rares exceptions, la vie spirituelle prend naissance dans un événement qu’on appelle la conversion (…). Temps inoubliable : comme une fête illuminée de clartés, il fait voir en Dieu le visage souriant du Père qui sort à la rencontre de son enfant. (…) Dieu nous guette à cet instant décisif. Il attend de notre foi un acte viril, la pleine et consciente acceptation de notre destin ; il nous demande de l’assumer librement. Personne ne peut le faire à notre place, par même Dieu. La croix est faite de nos faiblesses et de nos défaillances, elle est construite par nos élans essoufflés et surtout par nos ténèbres profondes où remue la sourde résistance et croupit l’inavouable et complice laideur, bref, par toute la complexité qui est à ce moment précis, le moi authentique. (…) Au moment de la pesante solitude, seule l’humilité profonde nous vient en aide, reconnaissant l’impuissante radicale de l’humain naturel : elle incline l’homme à déposer son être tout entier au pied de la croix et alors brusquement cette pesanteur écrasante, le Christ la soulève à notre place : Apprenez de moi que mon joug est aisé, et mon fardeau léger (Mt 11, 30). » (Les âges de la vie spirituelle, DDB, 1964, p. 66-68.)
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