Méditation du Père Daniel Ange pour le Triduum Pascal

Le Jeudi Saint
LAVEMENT DES PIEDS : Parmi vous, le plus petit
Dès le début, un acte inattendu, impromptu, stupéfiant, les sidère tous : Jésus tombe à genoux. Il fait ce que – seuls – faisaient les esclaves devant leur maître, ou les enfants pour leur père rentrant du travail : il lave leurs pieds. Ces pieds couverts de poussière, peut-être blessés par les cailloux de la route. Ces pieds qui ont couru avec lui sur les collines de Judée et de Galilée :
« Qu’ils sont beaux les pieds de celui qui annonce sur toutes les montagnes : le Seigneur règne… » [Is 52, 7]
Ces pieds qui vont continuer à courir à travers le monde pour porter la Vie, il les lave… Il se fait le plus petit. Il montre ce qu’est l’autorité : un service humble. Véritable révolution !
Il le fait parce que, douloureusement, il entend ses Apôtres se chamailler pour savoir qui est le plus grand parmi eux. Ils en sont encore là ! Aux balbutiements de la charité ! Et lui en est déjà au moment de l’ultime vérité ! Il y a de quoi être complètement découragé. Ils ont donc si peu compris ! Si peu appris durant ces trois années d’école ! Si peu saisi !
Mais heureusement Jésus sait que tout ce qu’ils n’ont pas encore pu comprendre, l’Esprit Saint leur sera donné pour l’intérioriser, le vivre en eux. Avec lui, ils comprendront tout et recevront quelque chose de sa propre sainteté. Mais justement, pour que l’Esprit puisse venir, il faut que lui les quitte.
Récemment encore, sur le chemin, il les avait entendus se quereller : histoires de préséances. Il avait simplement fait un geste, pris un enfant dans ses bras :
« Si tu ne deviens comme cet enfant, tu n’entreras pas dans le Royaume… Le plus grand ? Celui qui se fera petit comme un enfant. » [Mt 9, 43]
Ici, quelques heures avant d’être enlevé aux siens, l’enfant, c’est lui :
« Je suis au milieu de vous comme celui qui sert – comme l’enfant -. Faites de même » [Lc 22, 27]
Dans l’évangile de Jean, ce signe tient la place de l’Eucharistie, parce que c’est le mystère même de l’Eucharistie : là où Jésus se fait le plus petit, le plus faible, se fait mon serviteur pour me laver dans son sang, me parfumer de sa miséricorde. Se pardonner mutuellement, n’est-ce pas se parfumer les uns les autres avec le baume de la miséricorde[1] ?
Dis-moi, voudrais-tu vraiment d’un autre Dieu ? D’un tel Dieu, n’es-tu pas content, fier, heureux ?
Le dernier repas : la première messe
[Mt 26, 26-29 ; Mc 14, 22-25 ; Lc 22, 19-20]
C’est ce moment précis que Jésus choisit pour donner au monde le signe suprême de son amour. Amour qui se livre jusqu’au bout : l’Eucharistie !
Te souviens-tu ? Nous l’avions entendu nous y préparer dans la synagogue de Capharnaüm, après avoir multiplié les pains sur la colline. Combien de fois y avait-il pensé, en regardant des champs de blé prêts pour la moisson, en voyant sa petite Maman pétrir le pain, et joseph le sortir du four et le bénir sur la table de Nazareth (spécialement le pain du shabbat, chaque vendredi soir) ?
A chaque repas, pensait-il au dernier qu’il prendrait ? Il le préparait, l’attendait… Et le voici. Il va en faire le premier repas du monde nouveau. Ce repas va même l’inaugurer, l’instaurer.
Le blé et la vigne les plus proches de Jérusalem sont ceux de Bethléem – la maison du pain. Déjà, reposant dans la crèche où les animaux se nourrissent, n’était-il pas pain eucharistique ?
Viens et vois ce soir ton Roi ! Il prend ce pain fait avec le blé de Bethléem. Ce vin fait avec les raisins de Bethléem. Et voici que, dans ses mains, tout en restant pain et vin, ils deviennent Lui, Lui-même, Jésus, sa Personne ! Lui, l’Enfant de Bethléem !
« Ceci est mon corps, ceci est mon sang. »
« Mais qu’est-ce que cela veut bien dire ? », demandait-on à un enfant. Réponse du tac au tac : « Cela veut dire : “C’est moi !” »
Et quand il remet le pain dans les mains de Nathanael, de Pierre, de Matthieu, de Jacques, de Jean, il dit : « C’est moi ! Fais de moi ce qu’il te plaira. Quoi que tu fasses de moi, je te remercie… Je me remets dans tes mains. » Stupeur pour Matthieu, Jacques et les autres Ils regardent sidérés, tour à tour, ce morceau de pain dans leur paume et le visage de Jésus… « Est-ce possible ? » Et Jésus leur montre encore ce pain : « Oui, c’est bien moi, c’est moi ! »
Dans mes mains, il se livre
Jésus ne pouvait pas donner plus tôt son Corps, parce que ce n’est pas juste son Corps qu’il donne. C’est son Corps livré. Ce n’est pas juste son Sang qu’il donne. Mais son Sang versé. Il ne peut donc les donner qu’au moment même où, effectivement, son Corps va être livré et son Sang versé. Quelques instants avant, à la dernière minute. L’idéal – si j’ose dire –, c’est qu’il le fasse sur la Croix, mais alors ses mains seront liées…
Jésus se livrant dans les mains de Pierre, de Jacques et de Jean – et donc dans mes mains à moi, dans tes mains à toi –, c’est Jésus qui, dans quelques instants, va être livré entre les mains des pécheurs, des soldats qui vont l’arrêter. Mais aussi ce Jésus qui, dans quelques heures, demain, va s’abandonner entre les mains de son Père.
A Noël, il s’était remis tout entier dans les mains de Marie. A la Présentation, dans les mains du prêtre Syméon. Ce soir, il se remet dans les mains des siens. Tout à l’heure, dans les mains de Judas ; demain, dans les mains du Père. A jamais ! Chaque fois, c’est le même mouvement de Jésus.
Quand je reçois l’hostie, Jésus me dit : « Dans tes mains, je m’abandonne… » Et nos mains sont soit celles de ceux qui l’arrêtent, le manipulent – il va passer de mains en mains durant sa Passion –, soit celles de sa Maman à Noël, ou de son Père à la Croix. Je puis demander à Marie de l’accueillir en moi, comme elle l’a accueilli la nuit de Noël. Je puis demander au Père de venir l’accueillir en moi, comme il l’a accueilli au soir du Vendredi.
François d’Assise – qui avait un sens si aigu de ce mystère – disait qu’à chaque messe Noël se renouvelait : le Verbe descendait de nouveau du ciel pour venir dans la crèche de mon cœur. Il demandait à l’Esprit Saint de venir en lui accueillir Jésus.
Que je l’accueille comme Marie, mais aussi comme Jean ! Jean qui, ce soir, pose sa tête sur la poitrine de Jésus. – Un enfant regardant une icône : « Jean ausculte Jésus car il est très malade. Son cœur a beaucoup de fièvre… » Effectivement, il va en mourir, de cette fièvre d’amour. Son cœur va en éclater. – Jean entend battre le Cœur de Dieu dans le cœur de chair de son Maître. C’est ce qui m’est proposé à chaque communion.
La mort ne peut rien arracher, là où l’amour a tout donné…
Jésus, c’est l’Amour qui a tout donné, et ni sa Passion ni son exécution ne pourront lui arracher, lui ravir la vie. Il l’a déjà livrée !
Jésus se livre de lui-même, avant même d’être livré. Avant d’être trahi, il se trahit lui-même : il trahit l’amour qu’il a dans son cœur[1]. Aucune mainmise n’a été possible sur lui, car il s’est d’abord lui-même remis entre les mains des siens. Il semblera dominé par les événements : en réalité, c’est lui qui règne sur eux. Son oblation (son offrande) devance son arrestation. Son arrestation ratifie son oblation. C’est ainsi que l’Eucharistie enclenche la Passion. Et que la Passion appelle l’Eucharistie : offrande d’amour.
Moi aussi, je puis recevoir aujourd’hui comme venant de la main du Père ce qui autrefois m’a été infligé par la main des hommes. Je puis offrir aujourd’hui ce qu’hier j’ai été obligé de subir et accepter, ce qui alors m’a écrasé.
Ce qui dans mon existence a pu être saccagé, ravagé, je peux le reprendre en mains et le déposer aujourd’hui dans le cœur du Père. Surtout à travers l’Eucharistie, où Jésus dépose sa vie dans mes mains. Là où peut-être on a voulu m’enlever la vie, je peux la donner maintenant de moi-même. Là où j’ai été manipulé par les événements, je verrai ses propres mains à l’ouvre. Je peux consentir ici et maintenant aux choses subies un jour quelque part. Dans ce qui m’a semblé hasard, je peux déchiffrer son rêve d’amour. Ainsi, je peux recevoir mon passé comme un présent de Dieu, et lui en faire un présent.
L’épicentre d’une éruption volcanique ?
Jusqu’à présent, il avait donné sa parole, sa vérité, son travail, ses larmes, sa fatigue. Il n’avait cessé de donner. Mais aimer, n’est-ce pas donner tout et se donner soi-même ? L’Eucharistie, c’est cela et rien d’autre. C’est ce Jeudi soir, à table avec Jésus, que nous le comprenons.
Pendant cette première messe, Jésus voit déjà ces milliards de messes qui seront célébrées sur toutes les montagnes, dans toutes les vallées, toutes les villes, les forêts, les déserts, à travers toute la planète, par des prêtres et des fidèles de toutes races, peuples, nations et langues, à chaque minute du temps, jusqu’à la fin de l’Histoire. Avec le décalage horaire, pas une minute où il n’y ait quelque part dans le monde un prêtre qui dise : « Ceci est mon corps… Ceci est mon sang… »
Cette toute première fois où Jésus prononce ce mot, c’est la déflagration d’une explosion d’amour, dont les réactions en chaîne ne vont plus cesser[2].
Cette nuit-là, c’est aussi le Noël – la naissance – de l’Église, car sans ces hommes qu’il a choisis pour recevoir son corps et son sang, il n’y aurait pas d’Eucharistie. S’il ne leur avait pas donné son Corps, eux-mêmes ne deviendraient jamais son Corps-Église. Ici, ce soir, le peuple de Dieu (depuis Abraham) devient le Corps du Christ.
Dès ce soir, l’Église naît au moment où Jésus dit : « C’est moi ! » à chacun de ses prêtres. Ses prêtres qui sont ordonnés en cette nuit-là. Jésus a voulu avoir besoin de ces pauvres, de ces pécheurs, pour qu’ils continuent – eux et tous ceux qui leur succéderont jusqu’à la fin des temps – ce qu’il vient de faire en cette nuit. Pour que ce qui s’est passé en cette nuit soit actualisé tous les jours, toujours et partout. Et Jésus prie pour eux : « Père, consacre-les dans ta vérité, dans ton Esprit de vérité…« C’est leur ordination sacerdotale.
De fait, Jésus termine la première messe de l’Histoire par une immense prière d’action de grâce. On l’appelle la prière royale ou sacerdotale. En tant que Roi et Prêtre, Jésus s’interpose entre son Père et les siens. Il intercède pour tous ceux qui sont là : ses Apôtres, mais aussi tous ceux qui, grâce à eux – donc toi et moi aujourd’hui –, vont croire en lui et l’aimer.
Cette prière traverse tous les siècles. C’est la grande prière pour l’unité de tous les membres de son Corps. Unité qui doit être celle-là même qui est entre lui et son Père. Rien de moins Une unité trinitaire. Une unité eucharistique.
Et il termine avec ce grand cri : « Que tous puissent voir ma gloire ! » Il entre dans sa Passion et il pense à la gloire qu’il est en train d’obtenir pour tous ceux qui l’aiment :
« Père, je veux que là où je suis, ceux que tu m’as donnés soient aussi avec moi ! »
Telle est l’éblouissante nuit de l’Amour en sa plénitude ! Nuit où l’Amour se surpasse. Et plus jamais ne passera.
Dis-moi, voudrais-tu vraiment d’un autre Dieu ? D’un tel Dieu, n’es-tu pas content, fier, heureux ?
LE VENDREDI SAINT
Arrêté, enchaîné, prisonnier
[Mt 26, 47-56 ; Mc 14, 43-52 ; Le 22, 47-53 ; Jn 18, 2-11]
La pleine lune se réfléchit sur les feuilles argentées des vieux oliviers. Tout à coup, entends-tu ce qui brutalement déchire ce profond silence ?
Cliquetis d’armes, voix rauques, torches enflammées… Une brigade de police vient l’arrêter. Tel un gangster. Lui, l’Innocent. Après avoir été complètement écrasé, Jésus se redresse. Il est le Seigneur. Il a pleine conscience de tout ce qui va lui arriver, heure après heure. C’est lui qui mène les événements, dirige les opérations, organise sa propre arrestation. C’est lui qui s’avance au devant de Judas et des soldats. De lui-même. Librement. Lui qui prend l’initiative. Lui qui pose la question : « Qui donc cherchez-vous ? »
Rappelle-toi… C’était le premier mot qu’on a entendu sur ses lèvres, ce premier soir, au bord du Jourdain, quand il se retourne vers André et Jean : « Que cherchez-vous ? » [Jn 1, 38]
– « Jésus de Nazareth ! » Il ne se défile pas. Il ne s’enfuit pas. Il ne biaise pas. Il dit : « C’est moi ! »
Les gardes sont saisis par la majesté de son attitude, par la liberté de son comportement, par la sérénité de son visage. A tel point qu’ils en tombent à terre, sidérés. Comme si un éclair avait claqué dans le noir. En bons Juifs, ils connaissent les Écritures. Ils se rappellent le mot – sacré entre tous – que Moïse a entendu dans le Buisson ardent : « Je suis celui qui suis » [Ex 3, 14]. C’est comme si Jésus leur disait : « Le Buisson ardent où Dieu a parlé, c’est mon corps ! Je suis l’être. Je suis Dieu ! »
Ils saisissent. Ils tremblent. Ils tombent…
Viens et vois Jésus ! A cet instant-là, n’est-il pas vraiment l’Enfant-Roi ?
Rien ne me l’a fait mieux comprendre que ce que j’ai vécu une fois avec Martine. À dix-huit ans, elle avait écopé deux ans de détention. Alors qu’il ne lui restait plus que deux mois à purger, elle n’était pas rentrée d’une permission. Recueillie chez des amis, elle était traquée par la police. Pour en sortir, une seule solution : se rendre d’elle-même à la « justice ». Pendant trois jours, ce fut une agonie. Tentée par la mort, plutôt que de retourner dans l’enfer qu’est la sinistre Centrale. Elle finit par consentir. Nous l’avons emmenée à Fleury-Mérogis.
Je n’oublierai jamais cet instant pathétique… Non : magnifique ! Alors que nous étions tous accablés, elle était calme, paisible, presque souriante. Les policiers ont voulu se saisir d’une autre jeune fille qui nous accompagnait. Ce ne pouvait être qu’elle : elle s’était effondrée en sanglotant. Martine s’est alors approchée, pleinement maîtresse d’elle-même, et, d’une voix forte et claire : « Non, c’est moi ! » Les gardiens n’en revenaient pas. Elle était comme une petite reine. C’est elle qui dirigeait les opérations. Dans la liberté royale de celle qui d’avance a tout accepté. Elle a offert les mains aux menottes. Elle est entrée librement dans sa passion.
Quand je suis invité dans une prison, je dis aux détenus : « Jésus t’a précédé, Jésus t’a attendu… Lui aussi a été arrêté, emprisonné, torturé, condamné. »
Qui donc n’a jamais été trahi, renié par un ami ?
Regardant Judas droit dans les yeux, Jésus dit : « Mon ami… » Oui, celui dont il a fait « son familier, son intime, partageant le même pain » [Ps 54, 14]. Toute dernière perche qu’il lui tend. Il est toujours à la recherche de sa brebis perdue. Il voit Judas en train de se perdre. À tout prix, au prix de son sang, au prix de son agonie, il veut le sauver. Hier soir, il avait lavé le talon même qui allait se dresser contre lui [Ps 40, 10]. Il lui avait donné son Pain-Corps en cette nuit. Et maintenant, il ose lui dire : « Toi que j’aime encore… » Et ce n’est pas ironie ou sarcasme, cela jaillit du fond de son cœur. « Judas, non, il n’est pas trop tard pour toi. Il est toujours l’heure de recevoir mon pardon ! »
Jésus se laisse embrasser par son ami… Des baisers qui sont des trahisons, cela existe dans la vie…
L’amour que tu as pu attendre de quelqu’un, ou donner à quelqu’un, n’a-t-il jamais connu la déception, le reniement, la trahison ? Être trahi par quelqu’un qu’on aime ! Peu de blessures sont aussi profondes, aussi difficiles à cicatriser. Tout jeune que tu es, tu en sais sans doute quelque chose… Être trahi… Voir sa confiance trahie… Ici, reçois de Jésus-Amour un regard de pardon sur ceux qui t’ont ainsi déçu, renié, trahi…
Jésus a voulu être trahi, mais aussi renié. Et le pire : par celui sur qui il comptait le plus pour son Église : Pierre ! Un instant, Pierre essaie de le défendre, il coupe l’oreille de Malchus. Une dernière fois, Jésus opère une ultime guérison. Il ne tolère pas la souffrance d’un autre, il guérit même ses ennemis.
Et le voici en cette nuit, abandonné de tous. Tous se sauvent, et le petit Jean-Marc qui est là s’enfuit tout nu, lâchant le drap qui le couvre. C’est seul, tout seul que Jésus s’avance vers sa gloire… En pleine nuit, le voici donc arrêté, enchaîné, entraîné menottes aux poignets, jeté en prison pieds et poings liés.
A Jérusalem, on voit encore ce puits gigantesque dans lequel on suspendait, par des cordes passées sous les aisselles, les détenus qui tournoyaient sans fin, pendus dans le noir[1]…
Pendant que Judas s’en va se pendre, Jésus est donc pendu lui aussi, s’offrant pour le sauver. Le grand péché de Judas, ce n’est pas sa trahison, c’est son désespoir. C’est de n’avoir pas cru que Jésus pouvait encore lui pardonner jusqu’à la dernière minute. De n’avoir pas entrevu jusqu’où peut aller la Miséricorde sans limites. Pas un péché, même la trahison, qui ne puisse être pardonné !
Si Judas s’était tourné vers le Seigneur à ce moment-là, il serait devenu un grand saint que l’Église aurait fêté chaque année. Comme saint Pierre qui, lui, a renié, mais ensuite n’a pas refusé le pardon. Car, en cette nuit même, Pierre est lâche, peureux, comme je le suis moi-même si souvent [Mt 26, 69-75].
Et toi ? N’as-tu jamais rougi de Jésus devant des camarades, des filles, des profs…
Moi-même, je l’ai trahi, je l’ai renié ! C’était pendant mon service militaire. J’étais malade à l’hôpital, dans une chambrée de trente lits. Et lorsque l’aumônier est venu m’apporter Jésus, j’ai eu honte d’un Dieu aussi faible, aussi petit, sous la forme d’une petite hostie, tellement ridicule ! Je me suis enfoui sous mes couvertures pour que le prêtre ne me trouve pas. J’ai fui loin de Jésus. Une fraction de seconde après, je me suis ressaisi et je l’ai reçu. C’était un Mardi saint, le jour où l’Église se souvient du reniement de saint Pierre. J’ai renié mon Jésus, mais je sais que même cela, il me l’a pardonné… Oui, qui donc comme Pierre n’a jamais eu honte de lui ?
Et voilà Jésus qui, tôt le matin, passe devant Pierre. Il ne peut pas le prendre dans ses bras : ils sont ligotés. Il ne peut pas courir vers lui pour l’embrasser : ses chevilles sont cerclées de fers. Il ne peut même pas lui parler : on l’a bâillonné… Mais il peut le… regarder. Et un seul rayon de son regard ouvre dans le cœur de Pierre la source de ses larmes. Lui aussi n’a aucun mot pour dire : « Pardonne-moi ! », mais il sanglote comme un enfant. Qui sait s’il ne court pas se jeter dans les bras de Marie… La seule qui pouvait consoler notre pauvre vieux Pierre, si lâche et faible. Comme toi et moi le sommes si souvent… N’est-ce pas ?
Avoue que c’est réconfortant de se retrouver ainsi dans ceux qui n’ont pas vécu glorieusement la Passion, mais pauvrement, mais faiblement ! Quand tu dérapes, quand tu chutes, laisse les yeux de Jésus se poser sur toi… Déverser en toi la tendresse de son pardon : n’est-ce pas un baiser d’amour ?
L’Amour en personne est donc humilié, bafoué, renié, trahi…
Dis-moi franchement, voudrais-tu vraiment d’un autre Dieu ? D’un Dieu qui a été jusqu’à partager ce qui fait le plus mal au monde à un cœur humain, n’es-tu pas content, fier, heureux ?
Les 8 Paroles de Jésus en Croix
Au couchant, 8 diamants qui scintillent
Viens, écoute ! Écoute maintenant ces huit paroles, les toutes dernières paroles de Dieu sur la terre, qui vont consteller ses dernières heures parmi nous. A l’aube de sa vie apostolique, nous entendions son chant avec les huit couplets. Au soir couchant, nous recevons ces huit paroles. Alors, des couplets de chant. Ce soir, des murmures d’agonisant. Alors, joués sur une colline, au bord du lac de Galilée. Ce soir, criées sur une colline, aux abords des murs de la Cité.
Aucun des évangélistes ne les rapporte toutes. Feuilles d’automne emportées par le vent, tombant çà et là, et qu’il nous faut recueillir une à une, ultimes diamants de la Parole de Dieu[1].
Chacune de ces paroles est murmurée ou criée, suivant le cas, au prix d’atroces douleurs. Elles sont littéralement arrachées à son corps tétanisé. Pour avoir le souffle nécessaire pour murmurer ne fût-ce qu’une seule syllabe, il lui faut se soulever sur ses pieds transpercés, en tirant sur ses poignets aussi transpercés. Cha cune de ces ultimes paroles est donc chargée d’une souffrance intolérable, donc d’un amour inimaginable. Souffrance à son paroxysme. Amour à son apogée. Leur prix : infini, comme cet Amour-là.
Ils sont inconscients : sois d’autant plus aimant ![Lc 23, 34]
La première parole, il ne la dit pas une fois en passant, mais il la répète longtemps, longtemps. Parole qui habitait son cœur tout au long de sa Passion, mais tout à coup la voici sur ses lèvres : « Père, pardonne ! Ils ne savent ce qu’ils font ! »
Elle est lancée alors que, à coups de marteau, on enfonce les clous dans ses poignets et dans ses pieds posés l’un sur l’autre. Comment la dire avant que sa chair ne soit déchirée ? Elle déchire le voile du ciel, pour en faire descendre la tendresse du Père sur notre pauvre terre. Ses blessures : portes par où la miséricorde peut s’engouffrer sur notre terre. Tous les pardons déjà donnés à Myriam de Magdala et à tant d’autres, tout au long de ses routes, étaient autant d’anticipations de cet instant-ci où il allait dire : « Père, pardonne ! »
Cette parole : source de tous les pardons que nous-mêmes pouvons donner à notre tour. C’est ici, aux sources de ses mains ouvertes, que nous les puisons. Sources de tous les pardons qu’il va donner encore et encore, tout au long de l’Histoire, par les lèvres et les mains des serviteurs des pardons de l’Amour : les prêtres. Ici, cette cascade sans fin est déclenchée. Comme hier soir, en disant : « Ceci est mon corps… », toutes les messes du monde étaient enclenchées.
Sur les lèvres de tant de martyrs, ces mêmes mots vont éclore sous le souffle de l’Esprit. A commencer par le premier d’entre eux : Étienne [cf. Actes VII, 60]. Elles obtiendront la conversion de ce Saul qui garde les vêtements de ceux qui le lynchent : il en deviendra l’apôtre du monde entier. Saint Paul est l’enfant de la prière, de la souffrance, donc de l’amour d’Étienne.
Le jardin fermé, je te l’ouvre !
[Lc 23, 39-43]
À peine a-t-il imploré cette compassion du Père sur toute l’humanité qu’immédiatement il va l’appliquer à ce gangster, là, à ses côtés. On tue Jésus entre deux gangsters, dans l’espoir qu’on ne se souviendra pas plus de lui que de ces deux-là. Et c’est le contraire qui va se passer. Pour toute l’éternité, on entendra parler de ces deux hommes, à cause de lui. Il les a immortalisés par sa seule présence, surtout l’un des deux.
D’abord, tous deux l’insultent, comme tout le monde. A partir d’un certain moment, voilà que celui de droite a le cœur retourné. Que s’est-il passé ? On ne peut que le pressentir. Sans doute bouleversé par la douceur des yeux de Jésus posés sur lui, soudain il voit, non plus un condamné ruisselant de sueur et de sang, mais il voit… son Roi !
Il regarde un condamné à mort : il reconnaît le Maître de la mort. Il voit une potence : il pense à un Royaume ! Il voit un homme dans sa nudité, il entrevoit un Souverain en majesté.
Et il lui murmure une prière toute simple qui traversera tous les siècles, prière du pauvre d’entre les pauvres. Une des plus belles qui soient. Elle jaillit de son cœur : « Souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume ! » C’est tout. Il ne lui demande que cela : se souvenir de lui. Mais en répétant sa prière, en insistant. Et Jésus va lui accorder tout : le Royaume ! Rien de moins !
Le paradis ! Où donc Jésus a-t-il été pêcher son dernier mot ? J’ai beau chercher dans psaumes, prophètes, livres historiques, recueils de sagesse, nulle part je ne le trouve. Il faut remonter à l’Origine… Depuis que les grilles du Jardin s’étaient refermées, ce mot même en avait été oublié [Gn 2, 8]. Ce soir, l’ami perdu s’est laissé retrouver. La porte des Noces s’est ouverte… La terre de la Promesse, déjà le pauvre peut y entrer.
Pour la première fois, ce mot réapparaît sur les lèvres de Jésus, au moment même où il y introduit son ami. Il lui promet son Royaume, non pas pour demain, mais dès ce soir, d’ici une heure !
Mais avant même de lancer sa demande, ce beau gangster a été le seul a prendre la défense de Jésus, le seul à se faire l’avocat de Dieu durant sa Passion. Ce que Marie et Jean aimeraient faire – mais ne le peuvent –, ce que personne d’autre n’a fait (sauf un peu Pilate, mais en s’en lavant les mains). Au risque d’être à son tour conspué, le larron ose attester : « Celui-là n’a rien fait de criminel ! » Après avoir humblement avoué que lui, au contraire, mérite d’être ainsi châtié. En vérité, il se fait le témoin de l’innocence de Dieu, lui le coupable !
La réponse de Jésus est la première canonisation de l’Histoire : lui certifier qu’il sera dans le paradis, c’est dire qu’à cet instant il devient un saint.
Et la liturgie syriaque de s’écrier :
« Ô larron, fleur précoce de l’arbre de la croix, tu es le premier fruit du bois du Golgotha ! »
Après saint joseph, saint Jean-Baptiste et les enfants innocents de Bethléem, on peut dire que c’est le premier racheté par Jésus qui entre directement en paradis. Il ouvre la brèche, il fraye le chemin à une multitude à travers toute l’Histoire. Celui qui semblait au fond du précipice devient premier de cordée ! En notre nom, il pénètre dans le Royaume.
Jésus part juste un peu avant lui. La veille au soir, n’avait-il pas confié :
« Quand je partirai, j’irai vous préparer une place, afin que, là où je suis, vous soyez là aussi avec moi. » [Jn 14, 3]
Et n’avait-il pas prié son Père :
« Je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi. » Un 17, 24]
Nous pouvons deviner l’âme de ce Bon Larron, en voyant ceux d’aujourd’hui : parfois de grands criminels qui, in extremis, se tournent vers Jésus.
Rappelle-toi ce Pranzini – meurtrier d’une femme et de ses deux petites filles –, que Thérèse a enfanté à la vie éternelle. Cette petite Normande de 14 ans a voulu à tout prix – au prix de ses veilles et de ses jeûnes – l’arracher à l’enfer pour l’enfanter à sa vie divine. Ce qui avait poussé la Petite Thérèse à se passionner pour l’âme de cet homme à sauver, c’était une simple image : le sang de Jésus coulant de ses mains, pendant qu’il dit : « Pardonne ! » Elle ne veut pas que ce sang reste stérile. Elle veut lui faire porter du fruit. Elle veut appliquer ce sang à cet homme qui défraye la chronique. Et, à force de supplications, elle obtient son âme pour l’offrir au Seigneur. Clin d’œil du Seigneur : à la dernière minute, déjà sur l’échafaud, cet homme qui refusait jusque-là de voir l’aumônier, arrache le crucifix de ses mains et se met à en baiser… les Saintes Plaies
Nous avons tant de Pranzini à l’heure actuelle. Entre tant d’autres, je pense à notre Jacques Fesch[2] qui, durant ses mois de prison, vécut une bouleversante découverte de Jésus, grâce justement à cette Petite Thérèse. Il partira vers le Seigneur le même jour qu’elle, un 30 septembre (elle, en 1897. Lui en 1954).
Tu vois, ces trois croix manifestent ce qui se passe toujours. Il y a celui qui est révolté contre la souffrance et la mort. Il y a celui en qui cette révolte se change en offrande d’amour. Et au milieu, il y a Celui qui donne les pardons de l’Amour. Pour les trois, c’est la même souffrance physique, mais quelle différence entre chacune des croix ! La souffrance peut provoquer amertume et ressentiment – ce qui en augmente tellement la douleur – ou au contraire être chemin de sainteté, donc d’éternel bonheur. Et en attendant, d’une paix indicible dans le cœur.
Maman, je te la donne !
[Jn 19, 25-27]
Viens et vois Jésus, d’abord tourné vers ceux qui le crucifient, puis vers celui qui semble le plus loin de lui. Il se tourne maintenant vers ceux qui lui ont toujours été intimes, ce petit groupe autour de la Croix : fidèles d’entre les fidèles !
Regarde les deux Marie : celle de Nazareth et celle de Magdala. Celle qui, par avance, a été pardonnée pour que jamais elle ne chute. Et celle qui, après sa chute, a été relevée. Toutes deux – l’une par avance, l’autre par après – sont les enfants de son sang, c’est-à-dire de son amour.
Mystérieuses connivences entre elles : l’immaculée et la souillée. La Tendresse en personne et la pécheresse par excellence…
En voyant la beauté de Marie de Nazareth, comme transmise à Marie de Magdala, Jésus comprend que cela vaut la peine de répandre son sang. Qu’il ne sera pas stérilisé. Qu’il portera d’innombrables fruits. Le Bon Larron, Myriam de Magdala : voilà les deux premiers fruits visibles de son sang versé. Un homme, une femme ! Un gangster, une prostituée ! Et tous, grâce à sa Croix, vont pouvoir entrer au ciel, s’ils y consentent. Jésus peut dire à Myriam de Magdala : « Que tu es belle ! Sur ton visage, je vois la pureté de ma Mère… »
Tout à côté, il y a son bien-aimé : Jean. Jésus va alors faire son don suprême. Hier soir, il a donné jusqu’à son corps et son sang. Tout lui a été arraché : ses amis, sa réputation, sa liberté, ses pauvres vêtements. Il ne lui reste qu’elle. Plus rien qu’elle ! Avant de donner son âme à son Père, il reste sa Maman à donner à toute l’Église.
Marie a le cœur transpercé, avant que celui de Jésus ne le soit. Il s’ouvre pour enfanter Jean à sa vie divine. Elle devient la maman de Jean. C’est d’autant plus étonnant, que la propre maman de Jean (selon la chair) est là !
Marie ici reçoit Jean du cœur de Jésus. Plus tard, elle recevra Jésus des mains de Jean, quand il dira la messe pour elle, et lui remettra l’hostie dans les mains, pouvant lui dire : « Ceci est ton Enfant, celui-là même que tu portais dans tes mains à Bethléem… »
A Bethléem, Marie n’avait pas enfanté dans la douleur. C’est ici et maintenant qu’elle doit enfanter par un cœur qui se déchire. Commencée à l’Annonciation, sa maternité s’achève avec la Passion. Elle engendre dans la compassion ceux que son Enfant sauve par sa Passion.
Il la donne à toi et à moi. Jean, c’est toi et moi…[3] Marie engendre en moi saint Jean. Elle fait de moi un disciple d’amour, fidèle jusqu’au bout.
Oui, le jeune homme qu’est Jean, est à ce moment-là notre ambassadeur à tous. Le seul représentant – car le seul présent – des autres Apôtres qui ont fui par peur, par lâcheté. Il représente donc tous les prêtres et évêques, et chacun de nous. A travers lui, c’est toute l’Église qui est confiée à la Mère de Dieu. A ce moment précis, elle devient effectivement Mère de tous les enfants de Dieu. Jésus pourrait lui dire : « J’ai été ton enfant, je ne serais pas ici sans toi, tu m’as donné la vie… Tu m’as donné de quoi tout donner : ce corps qui me permet de souffrir et mourir pour eux. Cette chair que je puis leur donner en nourriture, ce sang que je puis verser. Maintenant, en moi, vois tous mes frères et sœurs que je suis en train d’engendrer à Dieu ! Sois leur Maman à tous, à toutes, à chacun, à chacune… »
Sa maternité passe de son corps physique à son Corps mystique. De son corps de chair pour le temps de la terre, à son Corps-Église pour toute l’éternité[4].
A dater de cet instant, Marie ne pourra plus regarder ou penser à son Enfant, sans en même temps te voir : ton visage en son Visage. Te recevoir, ton cœur au-dedans de son Cœur. Nous voilà désormais à jamais inséparables du Fils unique. Te voilà fils et fille en Jésus, et donc fils et fille de Marie.
Le « oui » de Gaël
Un témoignage bouleversant m’a permis d’approcher de ce mystère :
18 février 1981. Gaël fête gaiement ses 12 ans. En raccompagnant ses petits invités à l’ascenseur, il reste coincé entre les deux grilles. Personne ne parviendra à le délivrer. Pendant une longue demi-heure, il va étouffer. Et sa mère est là, derrière la terrible grille… Elle le voit, elle l’entend, elle ne peut rien faire. Rien ? Elle l’assiste comme jamais de tout son amour. Un seul mot passe encore sur ses lèvres : « Mon petit, tu es avec Jésus ! Tu es avec Jésus ! Tu es avec Jésus ! » Pour avoir une telle certitude en cette heure, comme il faut que Jésus soit avec elle[5] !
Gaël, lui, ne dit rien. A Jésus qui est avec lui : il s’ouvre, il souffre, il s’offre. Son visage en est tout apaisé. La veille, n’avait-il pas soigneusement écrit sur son calepin de louveteau :
« J’ai choisi comme mot clef : oui. Un oui de volonté, d’amour, mais pas un oui d’obéissance sous un ordre. Un oui qui veut dire : d’accord, je te suis, j’abandonne tout, je ne penserai plus qu’à toi. Pour moi, qu’est-ce que la foi ? La foi, c’est croire sans voir, accepter sans comprendre, accepter sans condition. »
Gaël ! Hier soir, une jeune fille t’aurait-elle invité dans sa chambre de Nazareth, pour que ce mot t’ait été ainsi donné ? Le mot qui, de son cœur, passe dans le tien, juste avant que Jésus ne vienne te prendre dans ses bras… qu’une petite Normande – Thérèse, toujours elle ! – osait appeler « l’ascenseur du ciel ». Ce mot clef qui t’ouvre les portes du ciel. Ce oui d’amour qui ne marchande pas, tu le partages en silence avec ta maman. C’est ta manière de lui répondre : « Maman, Marie est avec toi ! » La cruelle grille a beau vous séparer, vous êtes un comme jamais vous ne l’avez été. Un surtout avec cet autre Enfant, cette autre Maman qui, eux aussi, ne formaient qu’un cœur, qu’une âme, qu’un tout.
Ici, en toute vérité, Marie est Reine.
N’avait-elle pas entendu : « Il régnera sur le trône de David. » Le voici, son trône royal : la Croix. Elle y croit. Elle partage son trône, sa Croix : elle règne par sa foi. Si, un jour, il peut la couronner Reine du ciel et de la terre, de tout le cosmos et de toute l’Église, Reine des saints et des martyrs, Reine des pauvres et des pécheurs, c’est parce qu’elle a été, ici et maintenant, cette pauvre veuve éplorée ayant tout perdu, ayant donné Celui qui est le tout de sa vie. Mais debout, courageuse, vaillante. Elle s’offre avec son enfant pour t’enfanter, toi, à la vie du Père, dans l’Esprit Saint. Elle voit agoniser son Petit pour t’assister à ton tour en tous tes combats.
Et toi, voudrais-tu d’une autre Mère, d’une autre Reine ? N’es-tu donc pas fier, content, heureux d’elle ?
Ne la trouves-tu donc pas encore assez belle ? Voudrais-tu qu’elle soit plus humble, plus douloureuse, plus donnée ? Tu n’en trouveras pas dans le monde entier, ni dans toute l’histoire du monde ! Qu’attends-tu pour l’accueillir, alors que Jésus te la confie ? Pourquoi refuser ce don ? Pourquoi décevoir cette confiance que Dieu te fait ? Pourquoi mépriser un tel trésor d’amour ?
Regarde cette multitude d’hommes et de femmes, de jeunes et d’enfants, dont elle a été la grande douceur, la suprême douceur ! Cette Mère et cette Reine que les austères moines, au fond de leur désert, aiment chanter chaque soir, avec saint Bernard : « Ô douce Vierge Marie, salut, Reine ! » Pour qui sanglotait François d’Assise, à la seule pensée de sa Maman au pied de la Croix : « Salut, Dame Sainte ! »
Marie a connu tout ce que nos femmes vivent de plus terrible, de plus douloureux. Elle a connu toutes nos détresses, et on oserait dire qu’elle ne nous comprend pas, qu’elle serait lointaine, distante, indifférente ? Mais enfin, que te faudrait-il de plus pour l’aimer et te laisser aimer d’elle ?
Mais peut-être n’as-tu jamais connu de maman, ou du moins celle que tu as eue n’a pas été très ressemblante à Marie. Peut-être que tu rejettes Marie, à cause de ta maman… Peut-être que tu projettes sur Marie tous les travers, les petits côtés maternants, possessifs ou autres, que tu as pu rejeter…
Si tel est le cas, aujourd’hui, devant cette Maman avec son Enfant sur la croix, voudrais-tu donner un pardon à ta propre mère ? Voudrais-tu au moins dans ton cœur accueillir ta maman, même si elle n’a pas été ce qu’elle aurait dû être (ce qui reste à prouver, tellement nous pouvons être subjectifs). N’oublie jamais qu’après Dieu, c’est à elle que tu dois la vie. Tu ne connaîtras qu’au ciel tout ce qu’elle a pu souffrir pour te nourrir, peiner pour te porter, s’épuiser pour t’élever. Peut-être l’as-tu rejetée, insultée, bafouée… Accepte aujourd’hui de l’aimer telle qu’elle est – avec toutes ses pauvretés –, et de la confier à Marie.
Jésus te confie sa Mère. Toi, confie ta mère à Jésus !
Franchement, dis-moi : comment aimer Jésus, sans aimer Celle qu’il a le plus aimée au monde ? Celle qui l’a le plus aimé au monde… Celle qu’il s’était préparée, choisie. En qui il a habité pendant neuf mois… Et qui ne l’a pas quitté pendant les neuf heures de la Croix : le temps de gestation de l’Église.
C’est lorsque son Père semble s’effacer, que sa Mère est là, présente comme jamais. Délicatesse du Père ? S’effacer quelques instants pour que l’Enfant se tourne vers sa Maman… Et pour nous aussi, quand Jésus semble se taire, Marie est parole vivante, nous parlant de son Fils. Tant de personnes, d’abord attirées par Marie, ont pu être conduites par Elle à la grotte de Bethléem, à la colline du Calvaire, au jardin de Pâques !
Pour d’autres, c’est le contraire : Jésus doucement leur présente sa Mère…
Peut-être que dans certains moments de prière silencieuse, ou bien en contemplant son icône où son Enfant est presque toujours dans ses bras[6], tu pourras entendre Jésus te murmurer : « Ta maman, la voici ! Je te la confie… » Et tu entendras Jésus lui dire à elle : « Le voici, ton petit, ta petite ! Donne-lui ta beauté, ta pureté, ta lumière ! »
Ne l’oublie pas : c’est d’abord Jean qui est confié à Marie, ensuite seulement : Marie à Jean.
Pour la recueillir en la maison de ton cœur, il te faut commencer par te laisser, toi, recevoir par Elle, en Elle. Avant de la protéger, Elle. Par Elle te laisser enfanter.
Oui, vas-tu l’accueillir, la recueillir, la bénir ?
S’il te plaît, une gorgée d’eau !
[Jn 19, 28-29]
Lors des trois premières paroles, il s’oublie totalement (comme avec les filles de Jérusalem). Il ne pense qu’aux autres. Maintenant, écoute deux grands cris lancés dans l’espace, en plein cosmos. Qui va les recueillir ? Ils ne s’adressent à personne en particulier, du moins en apparence :
« J’ai soif ! »
Te rappelles-tu ? Ce pèlerin fatigué, sur la margelle d’un puits, mendiant un peu d’eau à une femme dite de mauvaise vie [Jn 4, 7]. Maintenant à bout de forces, en cette même heure de midi, le voici mendiant l’eau de ton amour. Il va mourir sans que personne ne lui offre un peu d’eau fraîche. Mais comme il sera désaltéré tout au long des siècles ! Ces milliards d’actes de pure générosité, de don de soi pour les plus petits de ses frères auxquels il s’est identifié, c’est à lui qu’on les faits. Chaque fois, c’est une gorgée d’eau claire.
Récemment, j’étais dans un bidonville de Port-au-Prince (Haïti), chez les petites sœurs de Mère Teresa. Dans toutes leurs chapelles, il y a cette parole : « J’ai soif ! » Et en chacun de ces petits enfants mourant du Sida – qu’elles recueillent et qu’elles soignent –, elles voient Jésus !
De même que Marie te voit sur le visage et t’aime dans le cœur de son Fils, de même toi, vois dans le cœur et le visage de chaque agonisant, de chaque personne blessée par la vie et par l’amour : Jésus
Entendant ce cri, un homme saisi de compassion lui tend une éponge imbibée de vinaigre. Pour ne pas lui faire de peine, pour ne pas l’humilier devant ses camarades, pour ne pas rendre vain ce beau geste de bonté, il en aspire une petite gorgée, au prix d’une nouvelle intolérable douleur (les poignets se déchirant un peu plus encore). Il reçoit comme faits à lui-même tous les gestes de miséricorde qui seront faits aux plus petits de ses frères.
Et que ferai-je, moi, pour le désaltérer ? L’eau de mes larmes n’y suffira pas… Chaque acte d’amour : un verre d’eau fraîche qui désaltère Dieu…
Mais un peu plus tôt, il avait refusé le breuvage anesthésiant (vin mêlé de fiel) [Mt 27, 34], pour pouvoir vivre pleinement jusqu’au bout, en toute lucidité, conscience tout éveillée, ce qu’il a à vivre. Pour pouvoir en faire une célébration.
Oui, il célèbre sa mort, comme le prêtre célèbre l’Eucharistie.
Sur les lèvres de Dieu, les mille « pourquoi » de ton cœur.
Les minutes s’écoulent, longues, longues, longues comme des siècles… Tous ricanent. On le tourne en dérision : « Roi d’Israël », « l’Élu », « Christ », « Fils de Dieu », ses plus beaux titres : diamants jetés aux pourceaux !
Et il entend les milliards de fois où, tout au long de l’Histoire, on prostituera ses paroles, on détournera son message, on défigurera son visage, dans la satyre, le sarcasme et jusque dans le porno.
Il entend. Il se tait. C’est à toi et moi qu’il laisse le soin de prendre sa défense. Tel le Bon Larron, témoin de l’innocence de Dieu !
Et voici la cinquième parole, la plus mystérieuse. Celle qui va le plus dérouter. Il savait que, régulièrement, elle serait retournée contre lui par les hérétiques. Mais il a préféré prendre ce risque, plutôt que nous ignorions jusqu’où il a épousé nos détresses. Jusqu’au fond de quel abîme il est descendu pour nous en arracher :
« Mon Dieu, mon Dieu, tu m’as abandonné… Pourquoi ? Pourquoi ? »
Alors qu’il disait : « Abba ! » dans le jardin, hier soir, il ne peut même plus le dire. Il est comme tant d’entre nous dans les heures de révolte et de détresse, où nous ne sommes même pas capables d’appeler Dieu notre Père. Tout juste pouvons-nous encore dire : « Mon Dieu… »
Ce pourquoi qui était le premier mot de Marie dans l’Évangile (après le Magnificat) [Lc 2, 48], et les premiers mots de l’Enfant de 12 ans, c’est aujourd’hui son dernier mot. Tous les pourquoi que tu portes, ils pénètrent son Cœur, affluent sur ses lèvres. Comment traverser la vie sans être assailli de doutes, de questionnements devant tant de détresses, de souffrances, d’injustices criantes, d’épreuves de toutes sortes ? Nous sommes bouleversés, heurtés par le Mal, parce que notre cœur est comme celui de Dieu.
Les souffrances et la mort de Jésus sont à la hauteur de l’atrocité du Mal. Pourquoi sa Passion aurait-elle été si terrible, si le Mal dans le monde n’était pas si horrible ? Pourquoi une mort aussi tragique, si le Mal n’était à ce point dramatique ? Pourquoi sa mise à mort criminelle, si n’existe pas le péché originel ? Nier le péché, c’est renier le Sauveur !
C’est parce que nous sommes tant aimés par Dieu, que nous sommes révoltés par le Mal.
Le drame, c’est lorsque nos pourquoi sont lancés dans le vide et tournent en rond. Alors que lui, il les lance vers son Père. Quand nos pourquoi peuvent être lancés vers une Personne, cela empêche au moins le pus de l’amertume et de la révolte d’infecter nos plaies. Quand nous pouvons nous mettre en colère contre Dieu, comme job : « Mais je ne comprends pas ! », « Mais qu’est-ce que tu fais ? », « Mais qu’est-ce qui t’arrive ? », « Mais qu’est-ce qui te prend ? » Au moins alors, nous traitons Dieu comme une Personne. Même si c’est pour se fâcher contre lui. Et finalement, je crois qu’il aime bien cela…
Viens et vois ton Roi : un pitoyable supplicié ! Misérablement pendu à un poteau. Dieu se tait.
Les anges se cachent. La foule blasphème. Les chefs rigolent. Les juges triomphent. Les disciples s’enfuient. L’enfer ricane. Les femmes pleurent. Le larron témoigne. Jean prie. Marie-Madeleine désespère. Marie aime…
D’un tel Dieu, aurais-tu honte ?
Un tel Dieu, le laisserais-tu seul ?
Dans tes bras comme un enfant
Mais voilà, tous ces pourquoi du monde, dans le Cœur de Jésus, viennent s’apaiser. Écoute la parole qui suit immédiatement… Ce n’est plus « mon Dieu ». Tout à coup, il retrouve « mon Père » [Lc 23, 46]. Il est de nouveau ce petit Enfant qui s’abandonne. A 12 ans, n’avait-il pas déjà dit : « C’est chez mon Père qu’il me faut être » [Lc 2, 49]. Tous nos « » doivent devenir en lui des « mon Dieu ! mon Père ! ». Et tous nos pourquoi doivent devenir des « Entre tes mains ».
– « Pourquoi m’as-tu abandonné ? » : « entre tes mains je m’abandonne. »
Que toutes nos impressions d’être abandonnés passent dans un sentiment de nous abandonner dans les très doux bras du Père. Et sans doute voit-il sa Maman, entre les bras de qui il s’abandonnait, quand il s’endormait dans la grotte de Bethléem. Et Elle, ici ce soir, de le confier sûrement aux bras de son Père.
Et voici : il remet son âme dans le Cœur de son Père.
Librement, volontairement, amoureusement.
Il est le seul à s’arracher à la vie humaine. De lui-même. Quand et comme il le veut :
« Ma vie, nul ne la prend, nul ne me l’arrache : la donner et la reprendre, j’en ai le pouvoir ! » [Jn 10, 18-20]
Tel est son dernier acte de liberté. Liberté suprême ! Il le fait pour que jamais aucun de nous ne s’arrache la vie de lui-même.
De même : l’instant où tu as reçu la vie et l’instant où tu entreras dans la Vie n’appartiennent qu’à Lui seul. A lui seul avec son Père de décider de l’instant final, comme ils avaient décidé du commencement de ton existence.
Sa mort – comme sa naissance – est la plus libre qui soit, car la plus amoureuse qui soit. C’est l’Enfant-Roi qui meurt comme un enfant.
Royalement. Majestueusement.
Enfin son dernier mot. L’ultime. Le septième. Dans un grand cri :
« Tout est accompli. » [Jn 19, 30]
Réalisé. Consommé. Achevé. Jusqu’à la fin. Jusqu’à la perfection. J’ai tout dit ! J’ai tout fait ! J’ai tout aimé ! J’ai tout donné, Père !
Je n’ai pas pu donner davantage, me donner plus profondément…
Oui, toute l’ouvre que tu m’avais confiée, la voilà réalisée !
Le Cœur, intarissable source de l’Amour et de la Vie
La huitième parole : l’ultime cri !
[Jn 19, 31-37]
Et voici tout à coup la surprise ! Inattendue ! Inespérée ! Imprévue !
On dirait qu’à peine son âme de Fils a-t-elle – enfin ! – retrouvé son Père, à peine s’est-il blotti à tout jamais dans le Cœur de son Père, qu’il lui dit : « Papa, je crois qu’il manque encore une parole… Tout ce que j’ai pu dire, j’ai peur que cela n’aille pas encore assez loin dans les cours, assez profond dans leur vie… Ah ! leur dire encore un tout dernier mot ! Comme le point final qui marque la fin d’un livre, le point d’orgue d’une symphonie. Une ultime parole qui les signe toutes. »
Mais le problème, c’est que chez les humains, après la mort, on ne peut plus parler, sinon d’une autre mystérieuse manière ?
Alors voici la trouvaille de génie de l’Esprit Saint…
Tout doucement, comme craignant de le blesser, le soldat enfonce sa lance… et violemment en jaillit un torrent d’eau et de sang[7]. Sa vie entière avait commencé par ce petit muscle encore tout ouvert qui commença à battre au 18e jour dans le sein de Marie. Et voici que tout s’achève avec ce Cœur qui, peu à peu, s’est rempli de tous ceux qu’il a rencontrés et, derrière eux, de toute l’humanité. Ce Cœur s’ouvre, comme le vase d’albâtre de Marie de Béthanie. Il faut que tout l’amour qu’il porte s’exprime et donne jusqu’à la dernière goutte. Blessure merveilleuse ! Blessure qui ne lui fait pas mal ! La seule dont il n’a pas souffert[8].
Te souviens-tu du suspense laissé à propos de la huitième béatitude, celle des persécutés qui exultent de joie ? Voici enfin la réponse.
L’ultime parole n’est pas prononcée : elle est faite, elle est geste. Elle n’est pas entendue : elle est vue, elle est signe. Parole au-delà de toute parole.
Aucune traduction ne pourra la trahir, aucun commentaire l’édulcorer. D’un seul regard, les analphabètes – les pauvres et les petits que nous sommes – pourront saisir son message : le Père n’est qu’un Cœur ouvert !
Dans toutes les langues de la terre, on le dira ! Dans toutes les cultures, on le comprendra !
Parole jaillie du Cœur et frappant chaque cœur…
Un Cœur transpercé, pour bouleverser les cours brisés. Un Cœur ouvert, pour ouvrir tous les cours.
8 : chiffre de la plénitude.
Cœur ouvert : plénitude débordante de l’Évangile.
La Parole faite chair, ici se fait Cœur, avant de se faire Pain.
Ne restent que le silence, l’émerveillement, l’adoration.
L'agonie à Gethsémani
La sainte Nuit où l’Enfant se donne :
la totale de l’amour !
[Mt 26, 30-75 ; Mc 14, 26-31 ; Lc 22, 39, 31-34]
Brusquement : « Levez-vous ! Partons d’ici ! » [Jn 14, 31]
C’est lui qui se lève le premier. Il prend la tête. Il entraîne les siens Où ? Vers la Passion. Dans la nuit, ils sortent dans la nuit…
Dans la nuit déjà avancée, quelques étoiles brillent. C’est la pleine lune d
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