Commentaire RB 6 : "Le silence"

1 Faisons ce que dit le Prophète :

J'ai dit : « Je surveillerai mes voies,

pour ne pas pécher par ma langue.

J'ai placé une garde à ma bouche ;

je me rends muet,

je m'humilie et je garde le silence,

même sur les choses bonnes. »

2 Le Prophète nous montre par là

que, si la pratique du silence doit parfois nous retenir

à l'endroit des bons discours,

combien plus la crainte du châtiment que mérite le péché

doit-elle nous faire éviter les paroles mauvaises !

3 C'est pourquoi, à cause de l'importance du silence,

on n'accordera que rarement aux disciples, fussent-ils parfaits,

la permission de parler,

même de choses bonnes, saintes et édifiantes.

4 Il est dit en effet :

En parlant beaucoup, tu n'éviteras pas le péché.

5 Et ailleurs :

La mort et la vie sont au pouvoir de la langue.

6 C'est, en effet, au maître qu'il convient de parler et d'instruire ;

se taire et écouter sied au disciple.

7 En conséquence,

si l'on a quelque chose à demander au supérieur,

on le fera en toute humilité,

soumission et respect.

8 Quant aux bouffonneries,

aux paroles vaines et qui ne sont bonnes

qu'à provoquer le rire,

nous les bannissons à tout jamais et en tout lieu,

et nous ne permettons pas au disciple

d'ouvrir la bouche pour de tels propos.

Le silence est un élément constitutif de notre vie. Pourquoi ? Parce que nous voulons écouter Dieu qui parle au fond de nos cœurs, et que trop de bruit extérieur nuit au silence intérieur et à l’écoute de la Parole que Dieu nous adresse.

Il y a quelque temps j’ai insisté sur le danger de la radio lorsque nous l’écoutons à n’importe quel moment, ou aux écouteurs sur les oreilles à n’importe quel moment. C’est aussi le danger du téléphone lorsque son usage devient excessif ou encore d’internet lorsque nous nous laissons envahir.

Les nouveaux moyens de communication sont une chance, un progrès, mais ils peuvent devenir un poison pour la vie monastique et pour le silence monastique.

Devenir moine, ce n’est pas pour autant cesser de parler, mais plutôt apprendre à parler. Souvent, lorsque l’on parle trop vite, on parle pour ne rien dire et Benoît condamne ici ce bavardage qui n’est rien d’autre qu’un bruit vide.

Pour nous aider à lutter contre le bavardage, je rappelle notre pratique à Bouaké : nous devons venir au chapitre en silence, après la messe le matin et après none à 15h. Aller en silence à l’église après le chapitre du soir. Je rappelle aussi que l’on doit éviter de parler dans les cloîtres et au réfectoire et privilégier les lieux prévus pour la parole : l’angle du réfectoire en allant à l’église, le citronnier situé entre le réfectoire et le noviciat, la salle du chapitre.

Nous devons surtout être fidèle à la Lectio, ce temps sacré où le silence de l’homme écoute la Parole de son Dieu. Le temps de l’Avent doit pouvoir nous aider à reprendre cette pratique que nous faisons ensemble.

Et pourtant, pour que la communauté se construise, il faut parfois oser parler et dire humblement et simplement ce que l’on pense à son supérieur, mais aussi en communauté lorsque l’on est interrogé, avec humilité (comme le dit la Règle). Il faut oser parler aussi à son frère parfois lorsque l’on n’est pas d’accord avec son attitude ou son comportement, c’est important de ne pas réserver cette mission au Prieur.

En résumé, la parole du moine n’est pas une parole qui répand des méchancetés, ce n’est pas non plus une parole d’amusement,  ce n’est pas non plus une parole vide, c’est une parole d’amour qui veut le bien de tous. Or, l’amour est créatif et parfois une parole fera rire et elle plaira à Dieu car elle apporte de la joie à un frère qui est triste. L’amour seul doit nous aider à discerner la valeur des paroles que nous prononçons à longueur de journée.

Je crois que nous devons faire des efforts actuellement par rapport au silence et je dis bien « nous ». Notre communauté est jeune, nous devons nous aider dans la garde du silence, il en va de la qualité de notre vie monastique personnelle et communautaire.

Un petit rappel liturgique :

• Lorsque l’on entre à l’Office, quelle que soit sa place, on vient au milieu du chœur, on s’incline devant l’autel et on regagne sa place, on n’entre pas par les côtés.
• Lorsque l’on arrive en retard à l’Office, on ne va pas à sa place directement, on vient au milieu du chœur, on s’incline devant l’autel, devant le prieur, et on regagne sa place.
• Lorsque l’on arrive à l’Office pendant le chant des Psaumes, on ne reste pas en civil avec les fidèles, mais l’on prend sa place au chœur discrètement. Si l’on arrive après le chant des Psaumes, on reste avec les fidèles.